mercredi 30 décembre 2009

MOI,LE METIS


                        MOI,MÉTIS 

Je suis un métis,c'est ainsi qu'on nous appelle,nous les mélanges d'ancêtres aussi divers que variés.Je suis né il n'y a pas très longtemps dans le campo,on appelle ça aussi le bled ou la brousse,ça dépend d'où on est.Enfin,bref dans un coin perdu de la campagne. Ma mère n'a jamais été très chanceuse,elle était seule.Mon père?Parti avant même ma naissance,peut-être bien sans même savoir que j'étais déjà là,caché quelque part dans les entrailles de ma pauvre mère. Des frères et soeurs,j'en avais à ne plus savoir qu'en faire. On mangeait à peine,et pas tous les jours,quand on voulait bien nous donner quelques restes.On vit dans un pays pauvre,il n'y a guère de place pour le superflux. Donc ,quand un jeune couple est arrivé pour m'adopter,ma mère n'a pas fait la difficile.Elle a accepté sans problème.Elle n'avait guère le choix.Les voisins aussi étaient ravis:c'en était toujours un de moins à nourrir.Ma mère a certainement pensé que j'avais ainsi quelque chance de vivre,mieux et plus longtemps. Je suis donc parti avec eux,c'était la première fois que je montais dans une voiture...J'ai été malade,j'avais peur qu'ils ne veuillent plus de moi,mais je n'y pouvais rien,j'avais mal au coeur.Mais ils ne m'ont pas grondé et m'ont gardé."Le pauvre",disaient-ils.Jamais on n'avait été aussi gentil avec moi,aussi affectueux. J'étais bien. Tous les trois,on a d'abord été voir ses parents à lui dans une grande maison avec d'autres enfants.Mais ces enfants venaient du même pays que mes nouveaux parents et ils ne m'ont accepté que difficilement.J'ai essayé de jouer avec eux,mais ils n'en manifestaient guère d'envie. C'était sans importance,les adultes me faisaient plein de câlins,me prenaient dans leur bras.J'ai connu la douceur des canapés et des fauteuils,le moelleux des lits et même quand je faisais des bêtises ,parce que ça m'arrivait,on me grondait un peu,on ne me frappait jamais...Je mangeais bien et suffisamment,ce que je n'avais jamais connu.Au bout de quelques jours,je me permettais même de choisir!!!Et on me donnait ce que j'aimais.Le bonheur,quoi!!! On m'a conduit chez le médecin qui m'a examiné sous toutes les coutures,m'a donné des vitamines et a déclaré que j'étais un très "beau métis".C'était la première fois que j'entendais ce mot.Ensuite,quand on leur demandait d'où je venais,ils répondaient :"C'est un métis". Le temps passant et la confiance s'installant,j'ai commencé à faire un peu trop de bêtises,je le reconnais maintenant!!!ils n'étaient plus aussi patients avec moi,surtout le jeune couple.J'ai même entendu "On va le ramener dans le campo".Seuls,ses parents me défendaient et leur disaient qu'il fallait un temps d'adaptation.Cela avait été pareil avec les leurs...Tiens,les autres étaient aussi adoptés.Ce n'était pas la peine de me snober,même s'ils ne venaient  pas du campo,comme moi. Et puis les choses ont commencé à se gâter entre eux.Ils se disputaient et un jour,elle est partie en me laissant avec lui.J'avais l'impression que je l'embarrassais parfois.On allait se promener ensemble et, puis ensuite,il me laissait seul.Ses parents protestaient,lui disaient que ce n'était pas normal,qu'il devait s'occuper de moi... On a déménagé plusieurs fois et on a fini par venir habiter près de chez ses parents.Alors,là,pas de problèmes.Quand j'en avais envie,je me sauvais et j'allais chez eux.Ils me cajolaient,j'ai passé d'excellents moments en famille,avec certains de leurs amis. mais ils me ramenaient toujours chez lui. Et puis un jour,je l'ai vu préparer ses affaires,tout ranger et on est allé s'installer chez ses parents.Ouf,j'étais soulagé,le vrai bonheur. Mais ça n'a pas duré.Au bout de quelques jours,il a à nouveau rangé ses affaires mais cette fois-ci,il a tout mis,ou presque,dans une valise.On allait encore déménager!!! Je comprenais bien qu'on parlait de moi.Visiblement,je posais un problème.Ses parents disaient qu'ils ne pouvaient pas me garder car il y avait incompatibilité d'humeur avec un des enfants.Il est vrai qu'il y en avait un que j'avais un peu ennuyé,mais sans plus.Mais quand il me voyait,il se sauvait et il avait décidé que,tant que je serai là,il ne reviendrait plus.Je comprends que cela ennuie les parents mais ,tout de même,il exagérait,il aurait pu faire un effort,je n'allais pas le manger!!!Mais visiblement,il était têtu. Car,ce que je compris vite,c'est que lui aussi,comme elle quelques mois plus tôt,il partait définitivement dans un endroit où je ne pouvais pas aller...En bref,j'étais abandonné et personne ne voulait de moi.J'étais triste,je m'étais bien habitué à eux et surtout je les aimais. Sa mère chercha une solution;une femme voulut bien me prendre,cela ne me plaisait qu'à moitié,mais je n'avais pas le choix.On ne me demandait pas mon avis.Je l'ai suivie tristement,elle était gentille mais quand elle n'était pas là,les autres me maltraitaient.Sa mère venait souvent me voir,elle m'apportait des gâteaux,des jouets,des vêtements,mais dès qu'elle était partie,les autres me volaient tout.J'avais l'impression qu'ils prenaient plaisir à me frapper.Je suis devenu moi aussi plus agressif,plus violent.Il fallait bien que je me défende dans un monde où seul le plus fort survivait! Ah !il était loin le beau métis.J'étais sale,dépenaillé,maigre,avec des traces de coups.Mais personne ne s'en préoccupait,on est tellement nombreux dans la rue dans cet état qu'on ne nous regarde même plus. Et puis,un jour,j'errais dans les rues,quand je l'ai entendue,elle,sa mère,dans une boutique.j suis entrée et je l'ai trouvée.J'étais tellement heureux de la voir!Mais ce qui m'a fait le plus plaisir,c'est qu'elle aussi était heureuse de me voir.Elle m'a embrassé et quand elle a ouvert la portière de sa voiture,j'ai sauté dedans. Mais elle m'a ramené chez la femme en m'expliquant qu'elle m'aimait beaucoup mais qu'elle ne pouvait pas me garder.La femme était gentille,c'était vrai,mais  elle était souvent absente et les autres en profitaient pour me battre,m'affamer.J'ai tout fait pour ne pas descendre de voiture,mais on m'a forcé.Sa mère avait les larmes aux yeux. Ma triste vie a continué ,mais je n'avais pas perdu espoir.Je partais seul de plus en plus souvent et de plus en plus loin.Et un jour,j'ai reconnu le chemin:c'était la route qui menait à la maison où j'avais été si heureux.J'y suis retourné,une fois,deux fois,trois fois.Je n'étais pas bien accueilli par les autres "adoptés"(c'est comme ça que je les appelais maintenant...),mais les adultes étaient heureux de me voir  ,cela se voyait,jusqu'au jour où ils décidèrent de ne plus me ramener là où j'étais si mal traité. Je reconnais quel'adopté qui ne m'aimait pas disparaissait quand j'étais là et cela semblait beaucoup la peiner.Pourtant je le laissais tranquille,mais il parait que je l'effrayais.Elle disait qu'il fallait trouver une solution:il n'était plus question que je retourne chez la femme.Déjà ça de gagné.Quels jours heureux,j'ai passé.Lavé,bichonné,caressé,bien nourri.A part celui que ne m'aimait pas,je jouais avec les autres enfants de la maison qui semblaient m'accepter. Et puis un jour,un homme est venu.Je l'avais déjà vu,c'était un de leurs amis.Il m'a parlé et m'a dit:"On va essayer de bien s'entendre tous les deux".Après un dernier câlin,je suis monté dans sa voiture.On a fait un voyage assez long,sur une piste."Pourvu qu'il ne me ramène pas dans le campo",je pensais. Au bout de ce qui m'a semblé un très long trajet,on est arrivé dans un grand jardin avec une petite maison.Je suis descendu doucement,j'ai regardé autour de moi,tout était noir,seules la lune et quelques étoiles éclairaient les bâtiments d'une lueur blafarde.J'avais peur,je voulais retourner chez moi et je me suis mis à pleurer,à hurler.J'avais mal,non pas parce qu'on me frappait ,mais parce que je n'en pouvais plus de cette vie,de ces abandons,de ces gens qui me prenaient et me rejetaient comme si j'étais un objet.Je pleurais et criais durant deux jours et deux nuits.Je ne mangeais pas,je ne laissais personne s'approcher de moi.L'homme qui semblait très occupé venait me voir de temps en temps.Quand il me parlait,je le regardais avec méfiance.S'il levait la main,je hurlais.Il me disait:"Mais je ne veux pas te frapper!".Je n'avais plus confiance en personne. Au bout de deux jours,je commençais à avoir faim.C'était vrai,personne ne me frappait.Je me suis approché prudemment de l'homme."Tu as faim?" et il me donna à manger.Ce n'était pas mauvais.Jour après jour,l'homme et moi avons fait connaissance.Il avait une ferme avec du bétail.Le premier jour,j'ai couru après les poules et les moutons,ce qui le mécontenta beaucoup.Puis je compris que ce qu'il voulait,c'était que je le suive,ce que je fis. Je me suis peu à peu habitué à cette nouvelle vie,différente des vies précédentes que j'avais connues.Ici,j'avais de l'espace ,des responsabilités.Un jour,une femme est arrivée.J'avais peur de lui déplaire,je me suis fait aussi gentil que je savais le faire.Elle m'a accepté et maintenant s'occupe de moi,comme une femme sait le faire. De temps en temps,mon ancienne famille vient me voir,avec quelques uns des enfants,on s'amuse ensemble,je suis heureux de les revoir.Mais je n'essaie plus de retourner dans leur maison.Je suis bien ici,je cours,je gambade,je garde le bétail,personne ne me bat.Je suis en liberté,personne ne m'attache.D'aileurs,je n'ai même plus de collier. Bien sûr,vous l'avez compris,je suis un chien, Mambo,le chien métis!!!Et oui,même chez les chiens,il y a des métis,c'est plus gentil de nous nommer que de nous appeler des b.....!


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jeudi 17 décembre 2009


                                        12 SEPTEMBRE 1917    

    Ce jour-là,il avait fait très chaud.le convoi s'était arrété au bord d'un oued en espérant pouvoir profiter de la fraîcheur de l'eau.Une chance que le cours d'eau ne soit pas à sec comme cela arrivait souvent l'été.
    Angéline était descendue du chariot où elle passait la plus grande partie du trajet,ayant renoncé,sur les conseils d'Hadrien,aux déplacements à cheval.Elle avait ôté ses chaussures et marchait lentement dans l'eau dont elle savourait la fraîcheur.Elle se dirigeait vers un groupe de femmes qui lavaient leur linge dans la rivière en parlant et riant.L'une d'elles s'était mise à chanter et les enfants qui criaient autour du groupe de femmes l'écoutaient.Tout d'un coup,une douleur vive au niveau du bas ventre l'arrêta dans sa marche.Elle en eut le souffle coupé,se plia en deux brutalement,sans pouvoir se reedresser ni avancer.Elle restait là avec cette douleur comme un coup de poignard,hébétée.Une des femmes qui la regardait avancer s'aperçut que quelque chose n'allait pas.Elle avertit ses compagnes et l'une,une des plus âgées,s'avança vers Angéline prostrée dans son attitude et qui sentait un liquide chaud s'écouler entre ses cuisses et former une tâche sombre que la terre sèche absorbait goulûment.La vieille femme s'approcha d'Angéline et lui dit,en arabe,doucement:
-Ton bébé va naitre!
La jeune femme lui répondit:
-Va chercher le médecin qui est là-bas,avec les soldats.
-Tu sais,j'ai fait naître plus de la moitié des enfants du village.
-Va le chercher,tu l'aideras,il parle bien l'arabe.
La vieille femme appela un des enfants et l'envoya vers le campement un peu plus loin avec pour mission de ramener le "toubib".
L'enfant partit en courant,peut-être pas très rassuré de se rendre au campement militaire malgré les ordres de la vieille femme.
-Je préfère rester près de toi,dit-elle à Angéline.
L'enfant revint vite accompagné d'Hadrien et d'un jeune soldat indigène qui lui servait d'assistant et que l'on appelait l'infirmier.
Il s'approcha d'Angéline à qui la vieille femme prodiguait quelques conseils,tout en la faisant respirer calmement.Il échangea quelques mots avec elle avant de s'adresser à Angéline.
-Bébé est un peu en avance mais pas trop.Nous allons nous rendre au village.Visisblement,elle est la sage-femme  et pourra m'aider.Je lui ai demandé de me préparer du linge propre,de l'eau bouillie.Cela va bien se passer.Vous pouvez marcher?On va vous aider.
Soutenue par la vieille femme et par Hadrien,Angéline se leva doucement et marcha lentement vers le village.Elle dut s'arrêter une fois quand une contraction plus violente se fit ressentir,mais ils parvinrent à bon port finalement sans trop de difficulté.
Ils se trouvèrent,conduits par la vieille femme et suivis par les autres femmes et les enfants qui avaient abandonné leurs ouvrages face à une maison semblable aux autres,en torchis.Les hommes se tenaient au loin,regardant la scène avec une certaine méfiance.
Ils entrèrent dans une pièce sombre.Une fois accoutumés à l'obscurité,ils distinguèrent une pièce au sol de terre battue recouvert en partie d'un tapis de laine aux couleurs vives .Un coffre de bois en occupait un coin et constituait le seul meuble avec une banquette de bois recouverte de coussins chamarrés.Un rideau sur un des côtés semblait indiquer la présence d'une autre pièce.La vieille femme s'y rendit et revint avec un drap blanc qu'elle plaça sur la banquette.Elle invita Angéline à s'y installer et repartit dans la petite pièce.Hadrien aida Angéline à s'installer en la soutenant à l'aide des coussins.
-Ici,les femmes accouchent assises.Je vais me faire aider par la sage-femme ...en essayant de faire au mieux avec nos deux techniques!!!Ne vous inquiétez pas.Malgré l'avance que prend le bébé,cela se présente bien,ajouta-t-il après l'avoir auscultée.
Les contractions s'accompagnaient de douleurs de plus en plus violentes et se faisaient plus rapprochées.
La vieille femme arriva en tenant à la main une boisson chaude et parfumée qu'elle présenta à Angéline.Celle-ci lança un regard interrogateur à Hadrien qui hocha la tête.
-Ne t'inquiète pas,lui dit la vieille femme,tu vas juste te calmer et tu sentiras moins la douleur,.Surtout,ajouta-t-elle ,en regardant tour à tour le médecin et la jeune femme,je pense qu'il y a deux bébés...C'est pour ça qu'ils sont en avance,ajouta-t-elle en souriant tendrement.
Hadrien et Angéline la regardèrent avec stupéfaction.
-Ce n'est pas possible,dit la jeune femme.
-Je ne sais pas,avoua Hadrien.Je n'ai pas en tant que médecin militaire une grande expérience des accouchements ,ajouta-t-il.Mais ne vous inquiétez pas!!!Cela ne posera pas plus de problème,je vous assure.
Angéline sentit peu à peu l'infusion faire son effet,la douleur s'atténuait,elle se sentait beaucoup moins angoissée,elle apprit plus tard que c'était en fait une décoction de hashish qu'elle avait ingérée,elle ressentait les contractions et suivait les indications du médecin et surtout de la vieille femme qui avait raison!!!C'étaient des jumeaux .Après presque deux heures de travail,une petite fille pointa le nez suivi quelques minutes après par un petit garçon.Comme tous les bébés du monde,ils étaient rouges et, en plus, pas bien gros en raison de leur avance,un peu plus de 2 kg ,précisa Hadrien.La vieille femme revint avec une balance qui servait à peser les légumes du marchand voisin et confirma leur poids.Comme toutes les mères du monde,Angéline les couvait du regard encore étonnée de son accouchement à la fois prématuré,double et dans des conditions peu ordinaires.
Le problème des prénoms se posa puisque Angéline pensait avoir le temps d'en choisir un avec Patrick .Là,il en fallait deux et de suite.Le commandant de la petite mission était venu lui rendre visite quand elle se fut un peu reposée.Il lui avait expliqué un peu gêné mais aussi très solennellement  qu'il représentait l'autorité française et qu'il devait recevoir et entériner l'état-civil des deux enfants.
-En France,on ne plaisante pas.L'enregistrement des prénoms et noms est immédiat.On n'est pas comme les Anglais qui peuvent attendre plusieurs jours,avait-il précisé.
Cruel dilemme pour la jeune femme!!La vieille femme était présente pendant la visite de l'officier et demanda à Angéline ce qui la préoccupait puisque la conversation avait eu lieu en français.
-Je peux te demander quelque chose,ma fille,parce que je remplace un peu ta mère qui est loin dans cette grande occasion.Tu sais,il ne faut pas oublier qu'il n'y a que nous qui pouvons donner la vie!!!Que feraient les hommes si nous n'étions pas là?Tu sais,ajouta-t-elle avec un sourire qui plissait tout son visage,on est toujours sûr de sa mère!!!mais de son père???Si tu imaginais tout ce que j'ai vu dans ce village seulement!!!.Appelle tes enfants comme tu veux,suivant ton pays et ta religion, mais,pour moi,ce sont les premiers roumis que je fais naître et en plus des jumeaux,donne leur un deuxième prénom que tu me laisses choisir!S'il te plait!!
-Lesquels?
-Kahina pour la fille et Juba pour le garçon!!
-Pourquoi ces prénoms?
-Si tu es d'accord,je te raconte leur histoire.ce sont des héros berbères qui se sont fait connaître pour leur résistance à l'oppresseur,Juba contre les Romains et Kahina contre les Arabes.
-D'accord,ce sera Pierre-Juba pour le garçon et Héloïse-Kahina pour la fille,répondit Angéline en s'interrogeant sur la réaction de l'officier chargé d'enregistrer les prénoms.




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vendredi 11 décembre 2009


            LA PRINCESSE ET LES PERLES



    Il était une fois dans un pays lointain,, en des temps très anciens un roi tout en majesté qui gouvernait sagement son royaume.Il ne voulait que le bonheur de ses sujets qui le vénéraient et ne lui reconnaissaient qu'un seul défaut:sa fille.

    En effet,le roi avait eu très tardivement une fille,qu'il avait prénommée Shemsiluna,Soleil et Lune.Sa naissance l'avait infiniment réjoui et il vouait à la princesse un amour et une admiration sans faille,qui s'étaient encore accrus  après la disparition prématurée de la reine,la mère de la Shemsiluna, alors qu'elle n'avait que 5 ans.

    Rien n'était trop beau pour Shemsiluna.La princesse avait  vécu entourée d' une véritable cour de nourrices à son service à qui le roi avait ordonné de satisfaire toutes les demandes de la princesse,demandes qui,bien vite,se transformèrent en caprices.Toute observation ou critique envers Shemsiluna était réfutée par le roi ,subjugué par sa fille dont,il faut le reconnaître, la beauté rayonnait chaque jour un peu plus,mais aussi dont le caractère empirait, à tel point que les nourrices et les professeurs qui l'entouraient, s'enfuyaient les uns après les autres,préférant affronter les foudres du souverain,au demeurant fort bon,plutôt que vivre dans l'entourage de cette petite peste, ainsi que l'on commençait à l'appeler dans le royaume,ce qui désespérait notre bon roi.

    "Que puis-je faire?",demandait-il.
Mais tous les courtisans,ministres,amis et relations qui osaient lui conseiller d'être un peu plus sévère avec sa fille, se voyaient écartés.

    La cour du roi ,autrefois si animée et joyeuse,où l'on chantait,dansait,où étaient souvent organisés de grands festins partagés avec la population,était maintenant désertée.Même les souverains étrangers refusaient les invitations que le roi multipliait.

    Désespérant,il decida de demander conseil à un de ses vieux amis,un ermite qui vivait dans le désert et dont la sagesse faisait l'admiration de tous.Le roi envoya un messager lui présenter son problème et le pria de venir près de lui.

    Durant le long voyage que dura pour l'ermite,le chemin depuis son désert jusqu'au palais du roi,le vieil homme réfléchit.Il connaissait Shemsiluna depuis sa naissance.Il savait que c'était une enfant belle,intelligente mais que le décès de sa mère et l'éducation permissive de son père avaient,pensait-il peut-être un peu sévèrement, complètement gâchée.

    C'est par cette réflexion très dure qu'il répondit au désarroi de son ami ,le roi.
    "Ta fille est belle et intelligente,mais elle a manqué de contraintes.Elle pense que le monde est là pour la servir.Il y a deux choses à faire:tout d'abord, lui prouver que,en dépit de ce qu'elle pense,tout ne lui est pas dû et refuser de satisfaire à ses caprices.Ensuite,lui montrer le monde tel qu'il est,avec ses beautés et ses laideurs,ses bontés et ses méchancetés."
"Mais elle a tout ce qu'elle veut,je ne sais plus que lui offrir, et je ne veux pas qu'elle souffres devant les laideurs du monde.Je l'ai toujours préservée.Viens,allons la voir.Elle t'aime beaucoup et peut-être sauras-tu en faire quelqu'un de différent."
  
    Il est vrai que c'est avec plaisir que Shemsiluna accueillit le vieil homme qui la complimenta d'être devenue une si belle jeune fille,comblée par son père.
"Oui,presque,répondit-elle.Je demande depuis plusieurs jours un bijou que personne ne veut m'offrir."
    Le roi,en entendant cette requête,houspilla son entourage.Comment?On ne l'avait pas averti du désir de sa fille.Un bijou!!!Certes,elle en avait beaucoup mais, si elle en voulait un nouveau,qu'à cela ne tienne,il allait le lui offrir.
    "Mais,Sire,osa dire un des courtisans,c'est impossible"
    "Comment ?Rien n'est impossible,je ferai appel aux meilleurs bijoutiers.Que veux-tu,mon enfant?"
"Un collier de perles."
Un collier de perles !Et pour cela on la faisait languir.
"Quelles perles?des roses?des blanches?des noires?de plusieurs couleurs?"
"Non,mon père,des perles que nous avons dans le palais"
"Montre-les moi"
Elle désigna la fontaine.Le roi regarda sans comprendre.Le vieil ermite souriait:il avait compris.
"Ta fille veut un collier en perles d'eau.Les perles qu'elle désire,ce sont les gouttes d'eau."
Abasourdi,le pauvre roi ne savait que dire.
"Mais,ma fille,cela est impossible"
"Toi aussi,tu me refuses un chose aussi simple que l'eau de notre fontaine."
L'ermite intervint alors.
"Moi,mon enfant,je peux te satisfaire.Viens avec moi."
Il lui demanda de s'habiller simplement(cela,ce fut difficile) et de le suivre.
"Tu me fais confiance"demanda-t-il au roi désespéré face au premier caprice de sa fille qu'il ne pouvait satisfaire.Pensant que le vieil ermite était aussi un peu magicien et surtout très sage et un peu fou,Il laissa sa fille sortir et pour la première fois,sans escorte,habillée le plus simplement possible(elle avait emprunté les vêtements d' une servante),Shemsiluna rencontra la vie.
Lors de ses sorties précédentes,le roi avait ordonné de nettoyer les rues de la ville,de cacher ce qui pouvait heurter la sensibilité de sa fille,la misère,les malades,les pauvres masures,les handicapés..La jolie princesse imaginait donc un monde extérieur semblable à sa vie au palais.Il faut aussi ajouter qu'elle ne s'en préoccupait guère,son égocentrisme tout comme son entourage la plaçant au centre du monde.
L'ermite la guidait dans le dédale des rues où la foule la bousculait.Il la fit taire quand elle voulut protester.
"N'oublie pas que personne ne te connaît ni ne te reconnaît."
Elle avait beaucoup de mal à l'admettre mais continua à suivre le vieil homme qui lui avait promis de satisfaire son caprice.
Il la mena d'abord à la rivière où l'eau boueuse charriait des branchages et toutes sortes de déchets.
"Que penses-tu de cette eau ...et de ses gouttes?"
La princesse regarda d'un air dégoûté le cours d'eau.
Puis,il la mena près d'un puits d'où les petites filles extrayaient de l'eau.Ils se penchèrent sur le bord et n'aperçurent qu'un grand trou noir.
Il lui montra ensuite les égouts de la ville qui horrifièrent la princesse,puis l'eau des caniveaux,celle des canaux d'irrigation et celle des flaques,celle de la mer et des lacs.Toute la journée,il lui montra toutes les formes que l'eau pouvait prendre.
Harassée,épuisée,elle le supplia bientôt de revenir au palais.
"Bien sûr,mais auparavant,tu dois choisir les perles d'eau que tu veux pour ton collier et les ramener au joaillier."
"Mais comment veux-tu que je ramène des perles d'eau?"
"Tu as vu l'eau sous toutes ses formes,ses couleurs.Tu as pu te rendre compte de l'utilisation que les hommes et les femmes en faisaient.Tu t'es rendue compte de sa nécessité.Mais maintenant,si tu veux un bijou en perles d'eau,tu dois fournir les perles au bijoutier,comme on lui fournit l'or,l'argent,les diamants,les turquoises et toutes les pierres précieuses de tes bijoux.Tu sais,ajouta-t-il en souriant d'un air malicieux,je ne t'ai promenée dans la ville et la campagne que pour te permettre de voir l'eau sous toutes ses facettes et ses couleurs afin que tu fasses ton choix.".
"Tu sais très bien que je ne peux pas attraper les perles d'eau."
"En effet,pas plus que le joailler ne peut te fabriquer un bijou en perles d'eau!"
Elle le regarda pensivement et lui sourit.La princesse était loin d'être bête et comprit la leçon.
"Merci de m'avoir permis d'ouvrir les yeux sur le monde extérieur et de me rendre compte de l'égoïsme de mes caprices."
Le vieil ermite estima sa tâche achevéeIl repartit dans son désert content d'avoir accompli sa mission en laissant son ami le roi heureux.
La princesse sortit de son palais et s'occupa de son royaume dont elle devint une reine bien-aimée quand son père âgé lui laissa le trône.
L'histoire ne dit pas si elle se maria et eut beaucoup d'enfants mais elle essaya de rendre son peuple heureux.L'une de ses actions principales fut de protéger la nature et de sauvegarder l'eau qui devait être partagée entre tous!!!et cela,il y a très longtemps!!!


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 Un conte ou une petite histoire
Quelques extraits de mes livres
Des souvenirs de voyage ou de vie
Bref, de l'imagination et du quotidien .





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